Petit village situé dans la préfecture de Zio, à 47 km de Lomé soit 12 km de Tsévié, Adangbé est un concentré d’histoire et de culture. La localité est surtout connue pour son rituel annuel Adjifo, une cérémonie qui, plus que toute autre, marque l’identité du peuple Adangbé.
Les Adangbé tirent leur origine du groupe « Ga-Adangbé » qui a émigré de la volta vers l’actuel territoire ghanéen en 1846. Mais des conflits internes liés aux luttes pour le pouvoir ont provoqué l’éclatement du groupe, chaque leader emportant avec lui une frange de la population. Une importante portion issue de cette scission a convergé vers le territoire togolais, s’installant dans ce qui aujourd’hui est connu comme la préfecture de Zio et plus précisément dans l’actuel canton de gbatopé, dans le village de Gati. Ces derniers sont les descendants les plus connus de ce peuple qu’on retrouve aussi dans d’autres régions du Togo.
Les « Adangbé » sont de grands agriculteurs et ils produisent principalement la noix de palme et l’igname. De fait, l’activité première des femmes « Adangbé » est la production de l’huile de palme qui occupe environ 90 pour cent d’entre-elles. L’igname très prisée et abondante chez les Adangbé est le symbole de leur fête traditionnelle « Téza » (« fête de l’igname ») célébrée chaque année au début du mois de septembre.
La marque identitaire, physique, des Adangbé est portée par leurs femmes. Il s’agit de trois petites scarifications dessinées sur le bras gauche et qui ne passent pas inaperçues. Les scarifications sont faites avec une lame ou un couteau tranchant trempé dans une poudre noire (Eti) censée aider la plaie à cicatriser rapidement. Ceci constitue l’ultime étape d’un long processus initiatique au cours duquel les filles du village sont retirées du cadre familial, logées dans un couvent, soumises à un régime alimentaire rude et à un code vestimentaire particulier. En effet, le seul accoutrement pendant cette période sacrée se résume à un cache-sexe : un bout de pagne retenu par des perles nouées autour de la taille.
« Dédé, Coco, Mamblé », tel sont généralement moquées (par autres que les Adangbé) ces trois cicatrices et celles qui les arborent. Ce sobriquet fait référence aux prénoms des trois premières filles dans les familles Adangbé
Cette cérémonie initiatique, dite des Adjifo, se déroule en octobre de chaque année. Déjà à la mi-septembre, peu après la « fête de l’igname », les parents font recenser leurs filles pour les formalités. La cérémonie est obligatoire pour toutes les filles du village. La légende raconte que toute fille qui ne se soumet pas à cette exigence traditionnelle pourrait perdre la raison.
A la fin de leur période initiatique, les filles « adjifo » sillonnent les rues pour esquisser des pas de danse à qui le désire, moyennant quelques pièces.
Ces processions des jeunes femmes « adjifo » suscitent enjouement et curiosité mais ne représentent que la partie visible d’une cérémonie qui en fait porte en elle toute une somme de messages. « Pour le peuple d’adangbé, la femme est l’être parfait pour transmettre des valeurs sûres à nos futures générations. C’est pourquoi nous leur enseignons dès le bas âge à travers cette cérémonie, les vertus clés de notre coutume notamment le courage, la fidélité et l’intégrité » explique Togbui Dally, traditionaliste et formateur des « adjifo ».
« Le nombre « trois » c’est l’absolu, le complet, l’idéal. En faisant ces trois petites plaies, nous éprouvons le courage de ces jeunes filles. Les interdits pendant la cérémonie testent leur intégrité et leur accoutrement met à l’épreuve leur capacité à résister aux tentations, à rester fidèles malgré tout », ajoute Togbui Dally.
Au Togo, de fortes « colonies » Adangbé sont également présentes à Aného et à Atapkamé, essentiellement.